14/12/2010

Indonésie: sur les routes du Mérapi

Indonésie: sur les routes du Mérapi

A l’origine mon cœur penchait plutôt pour un baroude vers les Philippines, mais les caprices de Dame Nature et la hasard de l’actualité en ont décidé autrement avec l’éruption du volcan Mérapi en Indonésie, l’un des plus actifs et des plus meurtriers du monde.

En découvrant ce drame à la lecture de journaux sur internet, j’ai ressenti l’envie de mettre mon égoïsme de « tour du mondiste » de côté, couplé au besoin d’aller prêter main forte à des gens qui en avaient peut-être besoin. Rapide prise de contact sur Couchsurfing pour découvrir comment/où/quand je peux être utile, j’achète mon billet et hop, j’arrive à Jakarta, capitale de l’Indonésie.

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Jakarta: mégalopole de près de 10 millions d’habitants, délaissée (à juste titre?) par les touristes car possédant une réputation sulfureuse de violence et peu de choses à voir. Jakarta est surtout une ville de transit pour des touristes pressés d’aller se dorer la pilule à Bali. Le plus impressionnant ici: les embouteillages monstrueux, à tout heure du jour et de la nuit. Ajoutez à ça qu’il n’existe pas de transports en commun (sauf un réseau de bus miteux) et vous avez…. un beau bordel. Et une pollution hors norme.

C’est Ru qui m’accueillera à l’aéroport, cette génialissime demoiselle rencontrée sur CS sera mon équipière de voyage pendant près de 3 semaines, mais ça je ne le sais pas encore. A l’origine, nous avions seulement prévu de récolter du matériel sur Jakarta puis de les porter dans un camps de réfugié près du volcan.

Je vous passe le reste des détails sur Jakarta ou je resterai une semaine environ avec Ru, collectant de ci de là des masques pour se protéger des retombées volcaniques, du sucre, des produits hygiéniques pour ces dames, des médicaments etc…
Ce qui m’a tout de même étonné, c’est qu’ici aussi les gens me dévisagent. C’est quand même incroyable de se dire qu’à Bali les occidentaux affluent, à Jakarta, que dalle. Certes Bali n’est plus l’île de Java mais c’est pourtant encore le même pays. Je prends alors conscience de l’immensité de ce pays de 290 millions d’habitants et me dit qu’une fois de plus je ne ferai que survoler un pays énorme comptant pas moins de 18000 îles (dont 6000 habitées), de multiples peuplades avec autant de dialectes et de traditions.

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Départ de Jakarta avec Ru, 12h de train + bus plus tard, arrivée à Boyolali où se situe l’avant-poste depuis lequel nous distribuerons la nourriture, nous sommes à environ 16 kms du cratère. Là encore, aucun occidental ne vient ici en tant normal et encore moins actuellement; les autres volontaires de l’association me regardent donc d’un regard curieux, puis bienveillant et enfin malicieux. Une fois la gène mutuelle passée nous tentons de communiquer, le problème étant de savoir qui parle quoi: javanais, indonésien ou anglais pour certains jeunes. Heureusement Ru est là, elle m’aura été d’une aide infinie pour traduire et m’expliquer car avec elle, aucun problème de communication! 🙂

Les questions sont les mêmes qu’habituellement (pourquoi tu voyages? Tu es marié? Tu es riche pour voyager si longtemps? Quelle est ta religion?) mais certaines questions m’intéressent plus particulièrement « nous sommes tous musulmans ici tu sais, mais en France vous croyez que nous sommes des terroristes, n’est-ce-pas ? ». Petit rappel, si l’Islam est très largement dominant en Indonésie, le fait qu’ils soient modérés voire très modérés leur a également valu d’être la cible d’attentats meurtriers. Nous sommes donc dans le même panier, idée que je me charge en tout cas de véhiculer.

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Notre imaginaire collectif aurait tendance à se représenter l’éruption d’un volcan comme des coulées de lave dégoulinantes et projetées dans les airs. Mais le Mérapi est un volcan dit « gris», à l’origine de fumées toxiques et de cendres projetées à tout vent. Les alentours du Mérapi, c’est la vision d‘un monde post-apocalyptique ou tout n‘est que gris et poussière. Ayant déjà une centaine de morts à son actif avant mon arrivée, le volcan a transformé les populations locales des 15 kms l’avoisinant en réfugiés, environ 3000 dans le secteur ou je suis allé. Toutefois, même si le Mérapi continuait à cracher ses entrailles, la situation d’urgence extrême était passé lorsque j‘ai mis les pieds là bas, les familles vivant le plus loin du cratère commençaient à rentrer au bercail. Et tant mieux, le but n’était pas de jouer le héros.

Les volontaires sont jeunes pour la plupart et j’admire profondément l’organisation dont-ils font preuve, leur maturité et leur intelligence à gérer ces évènements. Pas d’aide gouvernementale, la nourriture vient directement des fermes avoisinantes, les fonds et autre donations de la solidarité environnante.
Le local de l’association qui nous accueille est une pièce d’environ 60m², nous mangeons et dormons sur des paillasses à même le sol. J’ai parfois l’impression que les réfugiés, c’est nous! Le confort est sommaire mais on s’en fout, la bonne ambiance compense très largement.
J’ai particulièrement aimé aller à la rencontre de ces familles et porter ces ballots de biens de première nécessité, mais j’ai surtout compris (enfin, on me l’a fait remarquer à plusieurs reprises) à quel point les gens étaient heureux de voir qu’un étranger, quel qu’il soit, se préoccupe d’eux. Le fait de ne pas se sentir oubliés du reste du monde leur faisait chaud au cœur, je n’avais pas pris conscience de cette dimension psychologique. Au final mon aide a été plus morale que physique, à grand coup de sourires et de photos.
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Pour clore le chapitre du volcan, j’ai carrément adoré notre escapade en moto, à 500m du cratère, un jour de « calme » . C’est là que j’ai pu contempler ce monde gris; je vous invite à regarder les photos pour en avoir un aperçu.

J’ai quitté Boyolali et ses volontaires à regret, plutôt ému. Une fois de plus, ces gens m’ont apporté bien plus que ce que je n’ai pu leur offrir en retour. Une gentillesse hors norme, une innocence qui nous fait parfois défaut, l’un des moments fort de mon voyage à n’en pas douter, l’un de ceux que je n’oublierai jamais.

Nous partons avec Ru dans l’idée de visiter un peu les alentours. Notre duo de choc (un blanc + une fille) est probablement la meilleure combinaison possible pour voyager en auto-stop, ce qui se vérifie immédiatement. L’auto-stop n’est pas vraiment dans les mœurs indonésiennes, mais nous irons loin et vite! J’aime ce pays. Les paysages y sont enchanteurs, je suis notamment subjugué par ces rizières en terrasses multi-centenaires: c’est tout simplement magnifique, difficile de s’arracher de leur contemplation, le vert y est si beau…

Petite anecdote révélatrice de la gentillesse locale: notre second jour d’auto-stop, nous cherchons à rejoindre Solo, ville de départ de notre train en partance pour Jakarta. Ru tend négligemment le pouce et hop, la première voiture s’arrête. Il s’agit d’un charmant couple vivant à Solo. Ca tombe bien. Franche rigolade dans la voiture même si je ne comprends pas tout. Au final, non seulement ces gens nous conduiront à bon port, mais nous offrirons également de prendre une douche ainsi qu’un repas chez eux, puis au … karaoké! D’un côté je trouve ça formidable d’en arriver là alors que nous faisions simplement du stop, d’un autre côté ce fut la pire expérience de mon voyage, mon niveau de chant pouvant être qualifié de pitoyable voire d’horrible. J’ai eu très très honte :).
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Mais l’Indonésie, c’est aussi le pays par excellence de cette eau turquoise et idyllique que j’avais envie de voir depuis longtemps, frustré de ne l’avoir jamais contemplée que dans des magazines ou à la télé. Ru ayant des exams, nous retournons à Jakarta pour quelques jours avant d’embarquer sur un bateau destination les îles à 2h de voyage de là. Nous nous retrouvons sur une petite île nommée Pramuka, île ou les 300 habitants vivent au autarcie quasi-totale, vivant de leur pêche qu’ils expédient quotidiennement sur Jakarta; Le retour des pêcheurs au coucher du soleil est un moment assez sympa ou l’ensemble des villageois viennent contempler le bilan de la journée.
Ici encore, je n’échapperai pas au traditionnel « hello mister », un tantinet gonflant à la longue, mais comme c’est dit avec le sourire… difficile de râler.
Bref, ces 3 jours sur une île au confort rudimentaire furent des plus sympas, tant pour la détente (on tourne vite en rond) que pour le snorekling (admirer les poissons équipé d’un masque, d’un tuba et de palmes).

L’Indonésie étant mon dernier pays avant de poursuivre ma route vers l’Amérique latine, j’entends bien profiter de mes 2 derniers jours, ce qui sera chose faite en allant sur Bandung admirer un autre très beau volcan dont le cratère est rempli d’eau et de souffre, volcan non dangereux.

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Ainsi s’achève mon aventure asiatique, sur l’une des plus belles pages de mon tour du monde. Cette Indonésie j’y retournerai, ne serait-ce pour visiter ces gens que j’ai adoré et particulièrement Ru qui a fait des ces quelques jours un souvenir impérissable, de part ses idées, sa bonne humeur et tout ce qu’elle m’a fait découvrir de son pays.
J’ai une fois de plus eu la chance d’être entouré de personnes au cœur gros comme ça, aux idéos magnifiques et d’une gentillesse extrême. J’en ai retiré beaucoup à titre personnel et j’attends bien sûr avec impatience qu’un volcan pète en France pour mettre tout ça en pratique :).

A bientôt pour … le Paraguay, à quelques dizaines de milliers de kilomètres de là !

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