Le pays « Colombie » vous fait surement penser à Bétancourt, au café et aux FARC. La plupart du temps, la Colombie est associée à l’idée d’un pays dangereux, ce qui n’est plus le cas selon les voyageurs chevronnés rencontrés jusque là. Qu’en est-il vraiment? Récit d’un voyage en Colombie.
Hélène et moi avions envie d’aller en Colombie pour ses paysages réputés magnifiques, mais encore et surtout pour passer quelques jours en Amazonie, au cœur de cette forêt mythique que l‘on ne voit qu‘à la TV ou dans les magasines.
Qui n’a jamais rêvé d’entrer en pleine forêt vierge? Découvrir cet immense territoire, l’un des plus préservés de l’activité humaine car l’un des plus inaccessible relevait du domaine du rêve.
A peine arrivés sur Bogota, la capitale colombienne dont nous parlerons plus tard, nous prenons un avion pour Leticia, ville à l’extrême-sud du Brésil à l’endroit exact ou se joigne les 3 frontières du Brésil, du Pérou et de la Colombie. Pour accéder à Leticia c’est soit en bateau, soit en avion. La ville est coupée du monde, elle n’a aucun accès routier car enclavée dans la jungle.
L’ambiance ici est étrange mais sympathique: il est possible de passer à pied ou en bateau les frontières sans montrer de passeport ou avoir à se préoccuper d’un éventuel visa. Le côté enclavé de l’endroit joue pour beaucoup dans le charme de l‘endroit, on se sent revenu au temps des chercheurs d’or avec un mélange de ces villes mystiques dans Indiana Jones. La vie ici est simple, on vit en short tout au long de l’année, 15°C représentant l’équivalent d’un froid polaire pour les habitants.
En blanc-bec que nous sommes, il n’est pas pensable d’entrer dans la jungle seuls, nous ne survivrions pas très longtemps :). Nous passons donc par une agence, et étant en basse saison (la saison des pluies même si nous ne verrons pas une seule goutte!) nous sommes les seuls touristes Hélène et moi!
Ramiro, notre guide, nous accompagnera ainsi qu’un autre bonhomme dont j’ai oublié le nom, chauffeur de pirogue. L’idée est de passer 3 jours dans le jungle, coupés de tout et de tous, pour découvrir quelques-unes des merveilles dont recèle Dame Nature.
Ramiro est indigène, il est né dans une tribu non-primitive et n’a jamais quitté Leticia et ses environs immédiats. Le concept de grandes-surfaces ou d’un décollage d’avion lui semble assez vague et ne l’attire en rien. Il parle aussi bien espagnol que portugais et a une connaissance infinie de la forêt amazonienne.
Nous avons beaucoup aimé Ramiro, un mec simple, écologiste sans en être conscient pour autant, toujours souriant et se mettant en quatre pour que votre séjour se passe bien et que vous puissiez en voir un maximum en un minimum de temps.
Notre lieu d’hébergement, tout de bois construit en plein cœur de la jungle eSt en bordure du fleuve Amazone et se trouve à 2h30 de pirogue de Leticia.
Le premier soir, Ramiro souhaite nous montrer des caïmans. Pour ce faire nous devons attendre la nuit noire puis, munis d’une lampe-torche nous embarquons sur notre pirogue. Ramiro balaye la surface de l’eau avec a torche, ce qui lui permet de voir le reflet des yeux des bestiaux puis de nous en approcher lentement. Ils fuiront plusieurs fois au moment de notre approche, pour notre plus grande frustration et surtout celle de Ramiro. Mécontent de ne pas pouvoir attraper de caïman de taille significative, il descendra de la pirogue pour s’enfoncer dans les marécages, de nuit et aller attraper à la main un caïman de 80cm….impressionnant le mec, surtout lorsque vous pensez que maman caïman, une belle bête de 4m à 6m veille non loin de là et peut attaquer à tout moment pour protéger sa progéniture. Mais il est comme ça Ramiro. Et vas-y que je te tourne le croco, que je lui mets le doigt dans l’œil pour te montrer la double paupière pour empêcher l’eau d’entrer etc… joli sac à main.
Dans le même registre, Ramiro aka Tarzan peut voir ce que votre œil ne voit pas. En l’occurrence un paresseux, camouflé dans son arbre à 10m de hauteur environ. Qu’à cela ne tienne, Ramiro fonce à grand coup de machette dans la jungle, se hisse au sommet de l’arbre, décroche l’animal et nous le rapporte dans la pirogue. C’est marrant un paresseux , c’est moche, ça a une sale tête, c’est tout lent, mais c’est marrant :). Ramiro le rapportera ensuite dans son arbre.
Allez, une dernière pour la route: l’arbre avec une drôle de toile par-dessus; Ramiro ôte la toile, puis coupe la base du jeune arbre pour révéler un creux dans le tronc; Dans ce dernier, il introduit une petite branche pour pousser vers le haut on-ne-sait-quoi: en l’occurrence, une mygale !!! Effet de surprise garantie, surtout quand il l’embête juste pour le plaisir de l’énerver un peu.
Un autre moment jouissif: la pêche au Piranha. La seule pêche ou plus vous faites de bruit, plus vous attrapez de poisson. Accrochez n’importe quel truc sanguinolent à votre hameçon, vous êtes sur que ça mordra. Evitez juste de tomber à l’eau.
Bref, l’Amazonie: on recommande. Et fortement. Vous n’imaginez pas le bonheur que c’est de contemplez des dauphins roses et gris, de vous faire une sieste dans des hamacs, de mangez plein de fruits dont vous ne retiendrez de toute façon pas le nom, de dormir bercé par les bruits étranges de la jungle….c’est un must.
La suite c’est la fameuse ville de Carthagène sur laquelle nous arrivons en avion. La ville est de toute beauté, entourée de remparts antiques et bien préservés. Ses petites rues sont colorées, la musique est présente à tous les coins de rue, mais c’est très touristique et donc assez onéreux. Nous y passerons 2 jours seulement avant de nous farcir une journée de bus, avec un objectif simple: trouvez une plage de rêve et donc déserte, le long de la mer des caraïbes.
Ce coin de paradis nous le trouverons. Nous dormirons dans un hamac, sur la plage même dans un confort plus que sommaire mais largement suffisant, juste ce que nous cherchions. Le lieu s’appelle « Palomino », il n’y a tout simplement rien autour. C‘est la Colombie profonde. L’eau est bleue, les vagues ne boudent pas leur plaisir, le sable est blanc, les cocotiers fleurissent un peu partout.
Le lendemain, nous repartirons de la grande ville la plus proche avec un bus de nuit pour rejoindre la ville de Bucaramanga, au centre du pays.
Et c’est là que s’arrête le récit idyllique que je vous ai servi jusqu’à présent et que les emmerdes commencent.
Je commencerai par faire taire les mauvaises langues et je vous clame HAUT ET FORT que la Colombie est un pays sûr, que le problème des FARC est loin derrière. Ce pays n’est pas plus dangereux que n’importe quel autre pays en Amérique latine. Seulement voila, cette fois-ci, la chance va nous tourner le dos et cela va nous couter cher. Nous avons également commis une erreur, celle de prendre une bus de nuit en Colombie, à éviter dans la mesure du possible.
Il est 23h environ, nous sommes dans un bus, plein, avec 2 espagnols, 2 australiens, les autres étant colombiens. La plupart des gens dorment depuis un moment, mais je n’arrive pas à trouver le sommeil. Il n’y a pas de lumières si ce n’est celle de 2 écrans TV qui projettent un mauvais film et éclairent un peu l’habitacle.
Nous sommes à l’avant dernier rang avec Hélène. Je remarque alors sans m’en inquiéter qu’un mec passe anormalement longtemps dans les toilettes à l’arrière du bus. J’en conclue qu’il a probablement la tourista, jusqu’à ce que j’aperçoive dans la pénombre un mec remonter le couloir, le visage masqué par un pull. Ca fait tilt en un quart de seconde, je suis la première personne du bus à comprendre ce qui va arriver et réveille ma sœur pour lui dire que nous sommes attaqués. Les deux bonhommes sont évidemment de mèche, c’est très discret, sans bruit, pour réveiller le moins de gens possible. Celui de l’arrière sort des toilettes, armé d’un révolver et surveille le bus. L’autre pointe son arme sur le chauffeur pour lui dire d’arrêter le bus. Le chauffeur s’exécute, 2 autres voyous montent, également armés.
A ce stade, je me dois de préciser que nous n’avons pas peur sur le moment. Le sentiment de peur n’arrive qu’après. Ces gens n’ont aucune intention de vous tuer, ils veulent simplement vous dépouiller. Ca n’est pas agréable, mais mieux vaut satisfaire leurs demandes, nous ne courons aucun risque sans résistance.
C’est visiblement ce que n’a pas compris l’un des australiens qui refuse de donner son sac au premier rang et se voit appuyer un couteau sur le ventre, légèrement mais assez pour lui faire peur. Méthodiquement deux des mecs dépouillent tous les passagers, une attention toute particulière étant accordée aux touristes.
J’ai depuis longtemps pris pour habitude de répartir mon argent dans mes deux poches, en mettant les plus grosses coupures à droite, les moyennes et petites à gauche. Ayant compris très tôt ce qui allait se passer, j’ai le réflexe de cacher le contenu de ma poche droite profondément entre deux sièges, puis de tendre négligemment le reste au voleur. Ils nous fouillent méticuleusement, prennent l’argent à Hélène et passent aux suivants. La situation dégénère quelque peu derrière nous, un colombien refusant également de donner son sac à dos. Ca bastonne et pendant ce temps, je pousse avec mes pieds, mon sac à dos à moi, sous le siège de derrière. Le bonhomme de derrière perdra bien évidemment son sac à dos, puis comble de malchance vient re-vérifier si nous n’avons pas nous aussi un sac… et il trouvera celui d’Hélène, pas caché. Au revoir passeport, au revoir PC portable d’Hélène, au revoir carte de crédit, adieu appareil photo, adieu Ipod. Le bilan est lourd mais qu’importe, nous sommes sains et saufs.
Le mec de derrière pleure à chaudes larmes ayant perdu son PC portable dans l’histoire. Ca représente un lourd investissement pour le salaire moyen colombien, il lui faudra recommencer à bosser dur.
Quant à nous, nos PC étant achetés d’occasion, nous sommes seulement emmerdés pour le passeport et pour mes photos qui étaient sauvegardées sur le PC d’Hélène. Je viens de perdre 1 an de photos…moralement ça fait mal. C’est la raison pour laquelle vous n’aurez pas de photos de la Colombie, il y en avait pourtant de superbes sur la jungle et la côte Caraïbes…
La police arrivera bien après la guerre et se montrera aussi inutile qu’incompétente. Nous apprendrons plus tard que sur ce bus, sur cette ligne même, les attaques se répètent depuis bientôt 1 an sans qu’aucun voleur n’ai été arrêté.
Luiza, une colombienne vivant en Belgique mais dans le même bus au moment des faits a perdu beaucoup. Elle se montrera toutefois d’une gentillesse hors norme et nous invitera chez elle pendant 2 jours, nous prendra sous son aile en nous offrant à manger (nous avons toujours de l’argent et mes 2 cartes de crédit, donc aucun soucis!), en nous ouvrant les portes des diverses polices que nous devons aller voir pour déclarer le vol. Sans elle, nous aurions facilement perdu 1 à 2 jours supplémentaire, à naviguer de bureaux en bureaux, d’incompétents en crétins dégénérés.
Hélène et moi rions de notre expérience malheureuse car avons conscience qu’à aucun moment nous n’avons couru de danger physique. C’est important. Il convient désormais de refaire faire un passeport d’urgence à Hélène, car notre prochaine et dernière étape c’est le Carnaval au Brésil, et ça, pas question de le rater.
Je vous passe le détail des jours suivants, administratifs avec l’Ambassade de France; après plusieurs appels, mails, RDV, nous obtiendrons le sésame et Hélène pourra partir avec moi.
Entre temps et pas traumatisés pour 2 sous, nous faisons une escale dans un petit village à 4h de bus de Bogota, magnifique. Nous y serions bien restés si la situation avait été différente.
Que cela soit clair: nous retournerons en Colombie. C’est un pays magnifique et peu dangereux. J’insiste sur ce point. Nous avons été malchanceux, tous nous l’ont répété. Ce que nous avons vécu est l’exact opposé de ce que nous avons vu pendant les 2 semaines précédentes.
L’Amérique du sud comporte une part de risque et la voici, quiconque ne serait pas près à l’accepter de devrait pas venir sur ce continent.
Sur ces quelques lignes, retrouvons très bientôt pour le dernier article de ce blog tour du monde: le Brésil et son carnaval! Saaaaaaaaaaaambaaaaaaaaaaaa !